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Couverture du livre sur Santo

Un royaume canaque dans les nuages, la Tierra austrialia del Espiritu Santo

Un des intérêts de l’anthropologie dans le Pacifique est la faiblesse relative du poids des administrations coloniales. Les métropoles n’ont jamais cherché à y établir un encadrement coûteux. Elles ont donc créé des cadres indigènes, mal payés, mal formés, et à qui elles demandaient deux choses, les informer avec fidélité de ce qui se passait, et chercher par les moyens appropriés à ce qu’il ne se passe rien. En échange, ils étaient libres d’exercer l’arbitraire qu’ils pourraient, à condition que cela ne devienne pas une affaire scandaleuse et publique.

Les dits cadres, chefs ou sous-chef de villages, moniteurs d’enseignement, infirmiers, et même les policiers armés encasernés, ont mis beaucoup de soins et d’imagination pour agir sans que cela ne remonte à la connaissance de leurs chefs blancs, exerçant une juridiction de fait, nommant des chefs canaques dans les villages lointains, faisant désigner des assesseurs au tribunal dit « coutumier », choisissant qui soigner ou ne pas soigner, le fils de qui prendre ou ne pas prendre à l’école, selon la contribution des parents. Qui accuser, véridiquement ou faussement, il était si facile, théoriquement, de violer la loi du blanc, ou qui laisser faire.

Les insulaires sont les meilleurs observateurs du monde. La civilisation, pour eux, c’était l’arbitraire noir exercée au nom du Blanc, lequel ne savait jamais ce qui se passait réellement. Un certain nombre d’entre eux ont imaginé d’établir une ligne invisible au-delà de laquelle la volonté du Blanc ne pourrait plus s’exercer. Les Big Nambas du Nord Malekula ont réussi du fait d’une concentration exceptionnelle d’armes à feu et de la persuasion par les Blancs qu’ils étaient prêts à s’en servir.

Les habitants des montagnes, hauts plateaux et lignes de crêtes élevées au centre d’Espiritu Santo, entre 800 et 1200 mètres d’altitude, ont imaginé de monter en l’air et de se cacher dans les nuages. Ils ont bien choisis. En deux siècles, personne qui se dit blanc, né localement ou expatrié, n’a réussi, ni même a tenté d’y établir une autorité et de chercher à contrôler ces montagnards invisibles la plus grande partie de l’année. Mais il flottait dans l’air une inquiétude. Ces montagnards étaient armés.

Les Blancs leur vendaient des fusils depuis deux siècles et les commerçants chinois des munitions. Ils pourraient imaginer de venir massacrer les blancs. En plus, ils possédaient des arcs et des flèches empoisonnées. Un Blanc tuera deux montagnards dans des circonstances affreuses et un interdit planait de ce jour sur l’intérieur de l’île. Les Canaques allaient vouloir se venger. On demandera à l’anthropologue d’imaginer une réponse et d’intervenir. D’où ce livre. La question de la pertinence de la réponse à la question est l’affaire du lecteur.

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